Le 28 août 2019, j’annonçais la fermeture de mon journal, Le Peuple – Les vrais enjeux, causant le désarroi chez mes partisans et la joie parmi mes détracteurs. Après tout, je n’avais rien laissé paraître de mes intentions et le journal était en pleine croissance. Non seulement pouvait-il compter sur un lectorat quotidien de 10 000 Québécois, mais en plus, sa popularité aurait explosé s’il n’avait pas fermé quelques mois avant le début de la pandémie de COVID-19.
Presque deux ans plus tard, j’aimerais enfin vous expliquer les raisons qui m’ont poussé à enterrer mon média. D’entrée de jeu, je tiens à m’excuser pour mon long silence ; en vérité, j’ignore si mes explications intéressent désormais qui que ce soit. Néanmoins, je ressens l’obligation de me justifier, car je vous ai mobilisé au travers de mon média pour ensuite vous abandonner. Alors même si mes explications venaient à n’intéresser personne, le simple fait de « libérer la parole » me fera un bien immense.
Bref, trois facteurs m’ont poussé à fermer le journal : il me déprimait, il n’était pas suffisamment rentable et il me demandait trop d’énergie.
Un univers ingrat
Les bonnes nouvelles ne captivent personne. Afin de vendre leur salade, les médias doivent apeurer les gens. En fonction du média, les épouvantails à agiter diffèrent, mais la règle demeure. Le Peuple n’y faisait pas exception. Or, voilà : je n’en pouvais plus d’écrire, de réviser et de diffuser des nouvelles catastrophiques. Non seulement cela me démoralisait, mais en plus, cela fâchait mes lecteurs, qui nous inondaient de commentaires virulents nécessitant souvent d’être supprimés. Cette colère, quoique justifiée, était épuisante à confronter, d’autant plus qu’elle était rarement compensée par des compliments pour notre travail.
Les positions du journal contre la rectitude politique, le mondialisme, l’immigration massive ou encore l’islamisme nous ont aussi valu des détracteurs. De temps à autre, je recevais des insultes et parfois des menaces par messagerie privée. Heureusement, il ne m’est rien arrivé, mais il m’a fallu suivre des cours d’autodéfense afin d’assurer ma sécurité. Devoir surveiller mes arrières jouait sur mon moral.
En revanche, un des membres de mon équipe a été moins chanceux et a été la cible d’une offensive brutale non pas sur sa personne, mais sur sa réputation. Résultat : il a perdu sa chronique au sein du Journal de Montréal, qu’il venait tout juste d’acquérir, et a vu son employabilité se détériorer. Cette tragédie est survenue dans les derniers mois du journal et m’a beaucoup affecté, car je n’étais pas prêt à gérer la dissension et la critique qu’elle causerait au sein de mon équipe ainsi que de mes alliés. Je me suis senti très seul.
Un trou financier
Mettons les choses au clair : contrairement à ce que mes détracteurs pouvaient bien prétendre, le journal n’était pas parrainé par le Parti conservateur du Canada ou par le Mossad. Je suis partiellement responsable de cette méprise, car je n’ai pas été transparent sur les finances du journal. Si on considère que les membres de mon équipe étaient rémunérés – ils ne faisaient pas du bénévolat –, il était légitime de se poser des questions, car opérer un média coûte très cher.
Alors voici : le journal était financé de ma propre poche. En effet, j’ai connu un certain succès à titre d’entrepreneur et je m’imaginais continuer sur ma lancée en fondant un nouveau média de masse au même titre que Le Journal de Montréal, Radio-Canada ou La Presse. J’y croyais tant que j’ai investi un total de 250 000 $ dans cette aventure.
Malheureusement, le modèle d’affaires du Peuple, qui reposait sur la publicité et les abonnements, était voué à l’échec. D’un côté, la publicité me rapportait peu d’argent. De l’autre, je ne parvenais pas à convaincre mes lecteurs à payer un abonnement quand ils pouvaient consommer de l’information gratuitement et en abondance un peu partout sur Internet. En d’autres mots, Le Peuple était un trou financier que je devais constamment renflouer.
Le burn-out
Aucun des problèmes que j’ai soulevés jusqu’à présent n’était insurmontable en soi. Des solutions existaient. Or, j’en arrive ici à mentionner la troisième et ultime raison pour laquelle j’ai renoncé au journal : j’ai « pété au frette ».
Bien que je pouvais compter sur une équipe de quatre personnes pour m’épauler, tout mon temps libre était consacré à mon journal. En vérité, je suis impressionné par la variété de tâches que j’accomplissais à l’époque, mais je ne réalisais pas que je vivais sur du temps emprunté. Je dormais peu et me reposais encore moins. De nature très introvertie, je n’avais pas bâti les relations qui m’auraient permis de partager avec quelqu’un d’autre le poids sur mes épaules.
Durant les semaines qui ont précédé la fermeture du Peuple, j’étais si épuisé que même les tâches les plus banales me paraissaient laborieuses. Quand j’ai finalement annoncé à mon équipe et à mes lecteurs que je tirais un trait sur le journal, leur déception fut le coup de grâce. Sous les célébrations de mes opposants, je me suis effondré.
Un nouveau départ ?
Aujourd’hui, je me porte mieux, même si je n’ai pas tout à fait retrouvé mon énergie d’antan. À titre d’exemple, je ne parviens pas à m’indigner alors que nos dirigeants s’approprient toujours plus de contrôle sur nos vies au nom des « mesures sanitaires ». Je connais désormais le coût de l’implication politique et j’ignore si j’ai réellement ce qu’il faut pour payer ce prix. Pour le moment, je choisis donc le désabusement.
Cela dit, j’ai à nouveau envie d’écrire et c’est pourquoi j’ai lancé ce petit blogue. Je songe à rédiger quelques articles supplémentaires au sujet du Peuple afin de conclure une fois pour toutes cet épisode de mon existence, mais au-delà de ce projet, je ne sais pas quelle direction je souhaite prendre. On verra bien où l’inspiration me mènera. D’ici la publication de mon prochain article, je vous dis : à bientôt !